Gaspard, le garçon turbulent
Il était une fois dans le Nord du Maine, habitant dans une demeure cossue, une famille de trois enfants dénommés Léonie, Amandine et Gaspard.
D’un naturel doux, l’aînée, Léonie, approchait de ses 15 printemps et était de loin la plus responsable. Elle était d’ailleurs lasse de devoir toujours intervenir dans les fréquentes disputes entre les deux petits derniers.
Amandine, du haut de ses 10 ans, était demeurée une enfant espiègle et pleine d’imagination qui prenait plaisir à mener d’extraordinaires aventures solitaires.
Peu habitué à ne pas être au centre de l’attention, à 6 ans, Gaspard avait pris l’habitude de taquiner ses sœurs qui s’emportaient toujours aussi facilement. Ce jour-là, à quatre heures de l’après-midi, il rentrait justement de l’école.
Par la fenêtre, il aperçut Léonie qui arborait un étrange chapeau à plumes et admirait inlassablement son reflet dans le grand miroir du salon. Assise par terre, Amandine semblait au cœur d’une autre de ses explorations légendaires et travaillait à la construction de ce qui ressemblait à un fort.
– « Chouette ! », s’écria le petit garçon. « Je vais pouvoir m’amuser avec les filles ».
Dans un vacarme devenu habituel, Léonie et Amandine accueillirent l’arrivée de leur jeune frère en soupirant. Ce dernier se précipita dans la pièce, poussant la porte si fort qu’elle vint se cogner contre le buffet et fit tomber le joli vase de maman qui se brisa avec fracas.
– « Gaspard ! Tu ne peux pas faire attention ? », cria Léonie. « Que va dire maman ? »
– « Salut, Léonie. Je n’ai pas fait exprès. Qu’est-ce que tu portes à la tête ? C’est drôle ! Donne ! »
À ces mots, Gaspard s’empara du chapeau de la jeune fille, ce qui la mit fortement en colère.
– « Rends-moi mon chapeau ! Laisse-moi tranquille », hurla Léonie.
– « Crâneuse ! », taquina Gaspard tout en lui tirant les cheveux et en malmenant le chapeau. Alors que sa sœur tentait de lui reprendre l’objet des mains, Gaspard se débattit comme un petit diable et fit tomber le château qu’Amandine était en train de construire, le démolissant complètement.
– « Vilain, Gaspard ! », s’écria-t-elle. « Tu as cassé mon fort alors que je voulais le montrer à maman ! »
Toute à sa colère, elle prit un livre qu’elle jeta de toutes ses forces vers Gaspard qui l’évita de justesse. Malheureusement, celui-ci vint heurter un verre qui s’écrasa par terre en plusieurs morceaux. La porte s’ouvrit à ce moment-là, laissant se détacher l’ombre d’une maman outrée par le désordre et les cris des enfants.
– « Mais qu’est-ce que c’est que ce champ de bataille » ? demanda-t-elle en parcourant le salon du regard.
– « Ce n’est pas de ma faute », se défendit Gaspard. « Elles ne veulent pas jouer avec moi ».
– « Maman, c’est la faute de Gaspard. Avant qu’il n’arrive, nous étions toutes les deux tranquilles », se plaignit Léonie.
– « Et il a démoli mon fort », pleurnicha Amandine.
Maman comprit.
– « Viens avec moi Gaspard », tonna-t-elle. Une fois en haut, elle commença à lui parler en le regardant dans les yeux.
– « Gaspard, il faut vraiment que tu arrêtes d’être turbulent et que tu te calmes. Tu as constamment la bougeotte et on dirait parfois que tu fais partie d’une horde de sauvages ! C’est de pire en pire. Tu déranges constamment tes sœurs et cela t’étonne qu’elles ne veuillent pas jouer avec toi ? » déclara-t-elle.
– « Je n’ennuyais personne », protesta Gaspard.
– « Bien sûr. Mais si au moins tu essayais de faire quelques efforts pour paraître plus calme et pour essayer de faire plaisir aux autres. Cela ferait sûrement plaisir à tes sœurs », expliqua maman. « Tu ne voudrais pas essayer ?
Boudeur, Gaspard répliqua malgré tout :
– « Je vais y réfléchir ».
Le lendemain, Gaspard reprit le chemin de l’école et oublia sa discussion avec maman. Il s’en souvient à la sortie, sur le chemin du retour et se demanda ce qu’il pourrait faire pour faire plaisir à ses sœurs.
– « J’ai une idée ! », s’exclama l’enfant.
Il se glissa à l’intérieur de la maison sans faire de bruit et sans que personne ne s’en aperçoive. Alors, il jeta un paquet de bonbons sous le nez de Léonie, la surprenant vivement.
– « C’est pour toi. Je t’en ai laissé », dit-il avec un grand sourire.
– « C’est vrai ? » réussit à dire Léonie, éberluée.
Timide, Gaspard s’enfuit dans la cuisine où il eut l’idée d’attaquer la vaisselle sale qui attendait dans l’évier le retour de maman. Le garçon était en train d’essuyer quand sa maman poussa la porte :
– « ça alors ! Mais où est passé mon petit sauvage ? Mon petit Gaspard est-il enfin dompté ? », plaisanta-t-elle gaiement.
Gaspard sourit et se promit que dès lors, en rentrant à la maison après l’école, il ferait des plans pour surprendre agréablement sa famille. Bientôt, plutôt que de redouter l’arrivée de leur petit frère, Léonie et Amandine avaient pris l’habitude de dire :
– « Chic ! Vivement que Gaspard arrive ! »