Le Mage et les Trois Frères
Il était une fois dans une contrée lointaine d’Orient, un puissant mage du nom d’Ollowin. Respecté de tous, il faisait régner la paix et la prospérité dans le royaume. Comme seuls parents, ce dernier avait trois neveux : Harniel, Rusard et Mistrel, qui, tous, aspiraient à gagner les faveurs de leur oncle.
En effet, les trois frères espéraient pouvoir entrer dans les bonnes grâces d’Ollowin. Ils se livraient donc à des querelles incessantes pour devenir le disciple du magicien.
Afin de mettre fin aux rivalités, l’enchanteur décida de mettre Harniel, Rusard et Mistrel à l’épreuve. Il leur proposa de choisir parmi ses amulettes un talisman dont ils assureraient la garde pendant une année.
– « Permettez-moi, ô puissant mage, d’utiliser la bourse magique », avança Harniel. « J’en prendrai le plus grand soin et m’assurerai de répandre l’abondance dans la cité ».
– « Ma foi, le sceau du pouvoir serait pour moi le meilleur moyen de préserver la paix dans le royaume », annonça pour sa part Rusard.
– « Qu’en est-il de toi ? », s’enquit Ollowin, étonné du silence du plus jeune des frères.
– « Après réflexion, ô grand mage, je désirerais porter sur moi l’anneau de la sagesse », répondit Mistrel.
– « Ainsi soit fait », clama Ollowin. « Aux termes de l’année, vous reviendrez me remettre les amulettes ».
Tous trois repartirent alors avec leurs précieux trésors dont ils avaient désormais la charge. À la fin du délai convenu, les trois frères se rendirent à la demeure du magicien. Harniel fut le premier à prendre la parole.
– « Puissant enchanteur, accordez-moi quatre années de plus. Je n’ai malheureusement pas eu assez de temps pour amasser des fortunes ».
– « Pourtant, les récits de ta cupidité sont arrivés jusqu’à moi. As-tu comme tu l’as promis répandu l’abondance dans la cité ? », demanda le mage.
– « Hélas, mon bon maître, comment aurais-je pu ? La fructification de mes domaines occupait tout mon temps », se défendit Harniel.
– « Le sceau du pouvoir a-t-il assuré la paix dans la cité, Rusard ? », s’enquerra Ollowin auprès du cadet des frères.
– « Il me faudrait plus de temps, ô mage ! Le talisman m’a permis d’étendre mon autorité au-delà des limites de nos frontières. Hélas, ce ne fut pas pour plaire à certains de nos voisins qui, j’en suis persuadé, complotent contre moi », s’inquiéta Rusard.
– « Tes manigances t’ont été bénéfiques, mais ont détérioré nos relations avec les royaumes alentour, Rusard », gronda l’enchanteur.
« Et toi, Mistrel ? Tu me parais bien silencieux ».
– « L’anneau de la sagesse m’a prodigué nombre de savoirs, mon bon mage. Notamment le pouvoir de l’observation au-delà des discours pompeux et des actes inconsidérés.
La richesse apporte d’agréables avantages, mais qui, malheureusement, vous plongent dans le puits sans fond de l’insatisfaction.
Le pouvoir est un vil serviteur qui vous enchaîne et qui vous ôte le repos de l’âme et de l’esprit.
L’année écoulée m’a appris que la sagesse était la plus grande richesse et une source insoupçonnée de pouvoir.
Je vous remercie pour ce présent inestimable et vous le rends avec toute ma gratitude, ô mage », expliqua Mistrel face à ses frères décontenancés.
– « Mistrel, cher neveu, tu es assurément le plus méritant et le mieux disposé à recevoir mon enseignement », annonça Ollowin.
Dépités, Harniel et Rusard rendirent les amulettes à leur oncle et quittèrent la tête basse sa demeure.